lundi 1 octobre 2007

L'Eglise de Scientologie sur le banc des accusés

Une instruction judiciaire sur les activités de douze membres de l'Eglise de Scientologie (que nous appelerons la Scientologie) a été ouverte en Belgique en 1997 suite au dépôt de diverses plaintes allant de l'escroquerie à l'exercice illicite de l'art de guérir en passant par des violations de la vie privée et autres abus. Le procès devrait s'ouvrir prochainement à Bruxelles. Le verdict sera très important pour l'avenir de la Scientologie en Europe.
Critique
Symboles de l'Eglise de Scientologie.On dit beaucoup de choses sur la Scientologie. On la considère comme un mouvement religieux, un mouvement sectaire, une organisation pseudoscientifique, une organisation plus ou moins humanitaire, une organisation criminelle, un contre-pouvoir, etc. Où est la vérité ? La Scientologie est-elle une association exceptionnelle ou banale ?
De l'avis de tous les enquêteurs belges, français ou allemands qui ont étudié cette organisation, jusqu'à l'infilter durant plusieurs mois, la Scientologie n'est surement pas banale pour des raisons à la fois historiques, considérant son mode de fonctionnement et le nombre de controverses dont elle continue de faire l'objet.
Rien qu'à travers son nom, l'Eglise de Scientologie joue sur les deux tableaux : la science et la religion, deux concepts qui conduisent notre vie avec plus ou moins d'importance.
Mais la Scientologie n'est pas une science; elle utilise des méthodes pseudoscientifiques et un langage qui se veut scientifique.
La Scientologie prétend également être une religion, avec un dogme, des écritures, une hiérarchie, etc. Or, fondée en 1954 par Ron Hubbard, un écrivain de science-fiction et un ancien militaire, cette organisation présente tous les critères d'un commerce très lucratif et d'une association de personnes très peu respectueuses des législations.
Les libertés d'association, de pensée et de religion
En Belgique comme en France ou au Luxembourg, la Scientologie a du mal à se faire reconnaître. Récemment, pour se défendre, elle a fait valoir un arrêté des droits de l'homme d'avril 2007, dans lequel l'Etat russe a été condamné sur base de la liberté religieuse. Or la Scientologie devrait savoir que chaque Etat est souverain et que le droit russe ne s'applique donc pas en Belgique, comme le droit belge ne s'applique pas en France ou au Luxembourg.
Quand bien même une convention internationale assure la liberté de pensée et de religion, cela ne suffit pas pour garantir le libre excercice de ces libertés. Le pouvoir exécutif doit savoir quels en sont les limites et comment sont elles respectées. Ainsi, au niveau de la pratique, une organisation doit permettre à ses adhérents de pouvoir en sortir et ne pas les harceler.
Document Sablon.
De même, la Convention des droits de l'Homme reconnaît la liberté d'association et d'expression, mais elle précise également qu'on ne peut pas restreinte la liberté.
Or dans les deux cas, il est notoirement connu que la Scientologie ne respecte aucune de ces libertés fondamentales : les personnes n'ont pas le choix, tout est prévu, il faut suivre les procédures, les cours d'endocrinement, les stages, etc. Si une personne s'écarte du chemin balisé par les gourous, elle est mise en garde, punie, etc. Si elle essaye de quitter la secte, elle fait l'objet de harcelement.
La Scientologie embrigade ses membres, les endocrine, les intimide et les isole du monde extérieur. En d'autres termes, les libertés d'expression et de pensée sont encadrées dans un schéma. Ce n'est pas vraiment le sens que le législateur a donné au mot liberté.
Hormis les actes criminels ou simplement répréhensibles, la question des libertés est vraiment fondamentale et porte ses griefs sur tous les mouvements à tendance sectaire et nous avons vu que les Témoins de Jéhovah tombent encore trop souvent dans ce travers, raison pour laquelle ils sont également considérés comme un mouvement sectaire.
Le procès
Au cours des nombreuses enquêtes ouvertes tant en Belgique qu'en France à l'encontre de tous les mouvements à tendance sectaire, y compris des enquêtes parlementaires, les enquêteurs ont pris conscience qu'il existait une hiérarchisation des problèmes de secte.
Parmi tous ces mouvements, après plus de 10 ans d'enquêtes, ils ont confirmé que l'Eglise de Scientologie représentait le problème le plus sérieux.
Le but du procès intenté actuellement en Belgique contre la Scientologie n'est pas celui de la secte. Il consiste à confronter la somme de procédures judiciaires et de condamnations et de voir comment l'Etat peut poursuivre les personnes morales ou les personnes physiques à l'origine des activités d'enrichissement ainsi que les différents types de dérapages pouvant avoir un suivi devant les tribunaux afin de dégager les lignes de force du mouvement.
Dans le cadre du procès en cours, ce qui intéresse le procureur et les enquêteurs judiciaires est de savoir si les faits déposés au cours de la procédure pénale appartiennent au passé ou si la Scientologie a modifié son comportement au fil du temps et s'est en quelque sorte assagie et alignée avec la législation. La défense attend des preuves, alors que la Scientologie se fonde sur des écrits auxquels personne ne peut toucher. L'évolution de la Scientologie paraît donc a priori "cosmétique", les idées exprimées par Ron Hubbard n'ayant probablement pas subi de changements.
Concrètement, la question est notamment de savoir si c'est le fidèle qui a mal compris le message et s'est trompé ou si la personne morale est condamnable pour atteinte aux libertés, enrichissement, abus de confiance, etc. Dans le second cas, cela peut causer de gros problèmes à la Scientologie. Le risque, à terme, zqt de décrédibiliser totalement la Scientologie et de voir l'émergence de plusieurs courants de Scientologie. Si le concept de secte est valide, on se trouve devant un méga exemple avec la Scientologie.
Dans le fatras de contre-vérités qui existent également, la justice devra distinguer ce qui s'applique au domaine judiciaire.
La procédure actuelle est longue et complexe, les textes faisant références à des lois aussi disparates que le Code Napoléon, le droit civil, le droit commercial ou le droit pénal.
Les enquêtes ont duré plus de 10 ans, au cours desquelles il a fallut discerner ce que relève du droit commun, de la pratique illégale de la médecine, des détournements d'argent, de la violation de la vie privée, d'abus de confiance, etc.
La procédure a également été longue, non pas que les enquêtes ont été difficiles, mais les témoins ont alimenté les dossiers avec de nouvelles plaintes ce qui a reporté les conclusions de l'enquête, la justice voulant être sûr d'avoir un panel complet de la réalité judiciaire.
Les enjeux du procès
Le procès en cours peut-il donner un coup d'arrêt à la Scientologie ? A partir du moment où les arguments et les faits sont validés, si on peut établir l'escroquerie, l'exercice illicite de l'art de guérir, établir les violations de la vie privée et autres abus, démontrer comment la Scientologie instrumentalise ses adeptes, la justice va pouvoir condamner les personnes physiques et les personnes morales, les associations sans but lucratif ayant commis ces infractions, mettant aussi hors-la-loi et hors-circuit tout un mode de penser, tout au moins en Belgique, une décision qui peut aller jusqu'à l'interdiction et la dissolution du groupement.
Le plus gros enjeu ce procès est l'implantation de la Scientologie en Europe, dans la mesure où l'organisation est installée à Bruxelles qui est capitale de l'Europe.
Si l'Eglise de Scientologie est condamnée en droit belge, et en particulier la personne morale, cela aura des répercutions très négatives pour la secte au niveau international. La jurisprudence aura un effet sur le droit européen.
Voici quelques années, les gouvernements eurent l'idée de mettre en place un observatoire européen des phénomènes sectaire. Faute des moyens, jusqu'à présent on s'est reporté sur les organismes nationaux et notamment sur les enquêtes parlementaires.
Le verdict belge aura certainement un impact à l'étranger. Dans son aspect judiciaire, certains pays sont intéressés par l'issue de la procédure. Car il n'y a pas uniquement que des personnes physiques qui risquent d'être condamnées. Si la Belgique condamne la personne morale, cela incitera d'autres pays à engager des procédures contre la Scientologie.
Pour plus d'information et une revue complète du sujet, consulter l'article consacré à la critique de la Scientologie.

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