Le généticien américain Craig Venter du J. Craig Venter Institute (JCVI) a annoncé le 21 mai 2010 dans la version électronique du magazine Science que son équipe a créé une cellule bactérienne vivante à partir d'un génome de synthèse.
Un chromosome synthétique
Graig Venter est un poids lourd de la génétique et n'hésite pas à fanfaronner à l'occasion et à utiliser des tournures ronflantes pour qualifier ses avancées plus ou moins importantes en génétique, une manière de s'attirer les médias et indirectement l'attention des sponsors.
Graig Venter est un poids lourd de la génétique et n'hésite pas à fanfaronner à l'occasion et à utiliser des tournures ronflantes pour qualifier ses avancées plus ou moins importantes en génétique, une manière de s'attirer les médias et indirectement l'attention des sponsors.
Craig Venter dit notamment ceci à propos de son invention : "Nous parlons de cellule synthétique parce qu'elle est totalement dérivée d'un chromosome synthétique, fabriqué à partir de quatre bouteilles de produits chimiques dans un synthétiseur chimique, d'après des informations stockées dans un ordinateur".
En fait, seul le génome est synthétique, copie quasi parfaite de celui de la bactérie Mycoplasma mycoides. Et pour que ses gènes s'expriment, il a fallu les insérer dans une véritable bactérie dont le propre ADN a été préalablement retiré. Craig Venter n'a donc pas (encore) créé une cellule artificielle de toute pièce, la nuance est de taille !
En fait, seul le génome est synthétique, copie quasi parfaite de celui de la bactérie Mycoplasma mycoides. Et pour que ses gènes s'expriment, il a fallu les insérer dans une véritable bactérie dont le propre ADN a été préalablement retiré. Craig Venter n'a donc pas (encore) créé une cellule artificielle de toute pièce, la nuance est de taille !
Le résultat de 15 années de recherches
Bien que la nature artificielle de la nouvelle cellule soit donc limitée, les travaux de Craig Venter sont salués par la communauté scientifique comme une étape majeure de la biologie synthétique.
"Tout le monde est impressionné", témoigne le généticien Philippe Marlière, cofondateur de la start-up Global Bioenergies. "C'est un peu comme le jour où Gutenberg a imprimé sa première Bible. Certes, il avait emprunté la presse aux Romains et les caractères en relief aux Chinois, mais l'assemblage de ces techniques a changé l'histoire."
L'équipe de Craig Venter a en effet dû patiemment créer une ligne d'assemblage génétique inédite.
"Tout le monde est impressionné", témoigne le généticien Philippe Marlière, cofondateur de la start-up Global Bioenergies. "C'est un peu comme le jour où Gutenberg a imprimé sa première Bible. Certes, il avait emprunté la presse aux Romains et les caractères en relief aux Chinois, mais l'assemblage de ces techniques a changé l'histoire."
L'équipe de Craig Venter a en effet dû patiemment créer une ligne d'assemblage génétique inédite.
En 1995, elle fut la première à séquencer les 600 000 bases du chromosome de la bactérie Mycoplasma genitalium, considéré comme le plus petit ADN d'un organisme vivant.
Par la suite, en supprimant des gènes un à un, les chercheurs ont constaté qu'on pouvait passer de 500 à 400 gènes sans que la bactérie paraisse affectée. Ce résultat obtenu en 2003, l'a confortée dans la recherche d'un "génome minimal", nécessaire et suffisant à la reproduction cellulaire.
Restait à refabriquer un tel génome. Craig Venter, qui est accompagné dans ce projet par Hamilton Smith, Prix Nobel de médecine en 1978, et Clyde Hutchison, avait déjà synthétisé en 2003 un virus fonctionnel, le bactériophage PhiX174, de 5386 bases. Mais reconstituer un génome bactérien représentait un défi d'une toute autre envergure.
Restait à refabriquer un tel génome. Craig Venter, qui est accompagné dans ce projet par Hamilton Smith, Prix Nobel de médecine en 1978, et Clyde Hutchison, avait déjà synthétisé en 2003 un virus fonctionnel, le bactériophage PhiX174, de 5386 bases. Mais reconstituer un génome bactérien représentait un défi d'une toute autre envergure.
Les défis
L'équipe américaine a abordé le problème de deux manières. En 2007, elle a démontré qu'il était possible de transplanter un chromosome d'un microbe à un autre, de Mycoplasma mycoides vers Mycoplasma capricolum.
L'équipe américaine a abordé le problème de deux manières. En 2007, elle a démontré qu'il était possible de transplanter un chromosome d'un microbe à un autre, de Mycoplasma mycoides vers Mycoplasma capricolum.
La démonstration suivante fut apportée en 2008, lorsqu'ils décrivirent l'assemblage chimique et le clonage du génome de Mycoplasma genitalium.
La publication actuelle n'ajoute "que" les deux étapes précédentes. Mais les difficultés étaient à la hauteur des ambitions des chercheurs.
La publication actuelle n'ajoute "que" les deux étapes précédentes. Mais les difficultés étaient à la hauteur des ambitions des chercheurs.
En effet, le génome circulaire de Mycoplasma mycoides contient 1 million de bases. Pour le copier, il a fallu assembler un puzzle de 1000 fragments de 1080 bases, l'extrémité de chacun se fixant au suivant.
Cet ADN, où Craig Venter avait pris soin d'inscrire une signature (filigranes) prouvant qu'il était bien d'origine artificielle, a été assemblé par étapes, à l'intérieur d'une levure.
Cet ADN, où Craig Venter avait pris soin d'inscrire une signature (filigranes) prouvant qu'il était bien d'origine artificielle, a été assemblé par étapes, à l'intérieur d'une levure.
Le chromosome a ensuite été extrait et injecté dans la bactérie Mycoplasma capricolum. Après plusieurs mois de transplantations infructueuses, une colonie de bactéries bleues est apparue dans les boîtes de Petry, preuve que la greffe avait pris.
Les brevets
Graig Venter, qui aurait déjà investi 40 millions de dollars dans ce projet innovant, a déposé de nombreux brevets pour protéger sa "chaîne de montage" biotechnologique baptisée Mycoplasma laboratorium.
La prochaine étape de Venter consiste à assembler un organisme artificiel plus massif (au moins 2 millions de bases) et de concevoir de nouveaux génomes artificiels, ce qui suppose la connaissance préalable des fonctions des gènes, ce qui n'est pas encore gagné.
La prochaine étape de Venter consiste à assembler un organisme artificiel plus massif (au moins 2 millions de bases) et de concevoir de nouveaux génomes artificiels, ce qui suppose la connaissance préalable des fonctions des gènes, ce qui n'est pas encore gagné.
Enfin, si la nature est capable de contrôler le vieillissement cellulaire, un organisme artificiel ne peut se reproduire qu'un nombre limité de fois. Vender et ses confrères devront faire des compromis, et en cette matière on touche vite à la question de fond : jusqu'où peut-on aller ?
Et l'éthique ?
Peut-on en toute liberté créer des organismes vivants ? Peut-on à loisir programmer la durée de vie ou l'heure de la mort d'un organisme ? Telles sont bien quelques unes des questions de fond auxquelles les comités d'éthique et le pouvoir législatif devront bientôt répondre si on ne veut pas que la génétique dérape vers des pratiques douteuses.
Peut-on en toute liberté créer des organismes vivants ? Peut-on à loisir programmer la durée de vie ou l'heure de la mort d'un organisme ? Telles sont bien quelques unes des questions de fond auxquelles les comités d'éthique et le pouvoir législatif devront bientôt répondre si on ne veut pas que la génétique dérape vers des pratiques douteuses.
Pour plus d'information
Consultez l'article "First self-replicating synthetic bacterial cell" sur le site du JCVI.
Consultez l'article "First self-replicating synthetic bacterial cell" sur le site du JCVI.
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