Les sites Internet permettant de consulter des vidéos en streaming (en ligne) sont de plus en plus nombreux, pour citer au premier rang YouTube, Dailymotion, MySpace, Peekvid, Joox ou encore Youtbe.
Chacune de ces plate-formes permet aux utilisateurs de diffuser des vidéos sur Internet. Mais le système ne se cantonne pas à des vidéos amateurs et des milliers d’œuvres protégées par la propriété intellectuelle sont diffusées par ce biais.
C'est ainsi que pratiquement tous les jours des vidéos sous copyright sont retirées du site parce que les internautes ne respectent pas la législation. Mais sont-ils les seuls responsables ?
Tout comme avec le peer to peer (Cf les actions en justice de la Sabam en Belgique), la question de la responsabilité des plate-formes de streaming se pose : s’agit-il simplement de prestataires techniques d'un service Internet ou sont-ils au contraire de véritables éditeurs personnellement responsables du contenu mis en ligne ?
Les condamnations en France de deux sites emblématiques, Dailymotion et MySpace, apportent les premiers éléments de réponse.
Les condamnations en France de deux sites emblématiques, Dailymotion et MySpace, apportent les premiers éléments de réponse.
Affaire Dailymotion
La responsabilité de Dailymotion est retenue en tant qu’hébergeur de contenus (TGI Paris, 13 juillet 2007, Christian C, Nord Ouest Production c/o Dailymotion).
Dans cette affaire, les producteurs du film "Joyeux Noël" poursuivaient la société Dailymotion pour la diffusion non autorisée de ce film sur leur plate-forme.
Le TGI de Paris ne tient pas compte de l'argument publicitaire mais privilégie une responsabilité des hébergeurs de contenus définis par la LCEN (Loi du 21 juin 2004, article 6-1-7).
Selon le tribunal, Dailymotion ne pouvait ignorer que le service qu’elle offrait serait utilisé principalement pour diffuser des œuvres protégées par le droit d’auteur et que le succès de l’entreprise supposait nécessairement la diffusion d’œuvres connues du public "afin d’accroître l’audience et les recettes publicitaires." En conséquence, la société Dailymotion est responsable et ne peut rejeter la faute sur les utilisateurs de son service "dès lors qu’elle leur fourni délibérément les moyens de la commettre."
Affaire MySpaceLa responsabilité de MySpace est retenue en tant qu’éditeur de contenus (TGI de Paris, Ordonnance de référé du 22 juin 2007, Lafesse c/o MySpace) .
Mais contrairement à l'affaire Dailymotion, dans son ordonnance, le juge des référés du TGI retient cette fois l'objectif publicitaire. "S’il est incontestable que la société défenderesse exerce les fonctions techniques d’hébergement, elle ne se limite pas à cette fonction technique ; qu’en effet, imposant une structure de présentation par cadres qu’elle met manifestement à la disposition des hébergés et diffusant à l’occasion de chaque consultation, des publicités dont elle tire manifestement profit, elle a le statut d’éditeur et doit en assumer les responsabilités".
Autrement dit, c’est parce que la société MySpace s’enrichit grâce aux publicités qu’elle diffuse sur chaque page de son site que sa responsabilité éditoriale est engagée, quand bien même elle n’est pas l’auteur de la page litigieuse.
En conséquence Myspace est condamné à verser à M. Lafesse 50000 € de dommage et intérêt pour son préjudice matériel, 3000 € pour le préjudice moral et 5000 € pour le dommage résultant lié à ses droits de la personnalité !
Autrement dit, c’est parce que la société MySpace s’enrichit grâce aux publicités qu’elle diffuse sur chaque page de son site que sa responsabilité éditoriale est engagée, quand bien même elle n’est pas l’auteur de la page litigieuse.
En conséquence Myspace est condamné à verser à M. Lafesse 50000 € de dommage et intérêt pour son préjudice matériel, 3000 € pour le préjudice moral et 5000 € pour le dommage résultant lié à ses droits de la personnalité !
Conclusion
Selon le juriste Sulliman Omarjee, "Au final, ces deux décisions reviennent à sanctionner un modèle économique s’enrichissant sur les pratiques contrefaisantes d’autrui et à faire peser sur les exploitants de ces sites une véritable obligation de surveillance.
Cette dérive est regrettable car contraire à l’esprit de la loi : l’activité de ces plate-formes communautaires s’assimile à notre sens plus à un hébergement, l’éditeur demeurant l’auteur réel de chaque page. Dès lors, le critère de publicité ne devrait être utilisé que pour confondre l’hébergeur, qui mit en demeure d’empêcher l’accès à un contenu litigieux, n’obtempère pas et continue à engranger des recettes publicitaires. Dailymotion ayant fait appel de sa condamnation, osons espérer que les seconds juges corrigeront ce faux pas."
Pour plus d'information, consultez l'article "Streaming: Dailymotion et MySpace sont responsables !" publié sur le site juridique "Droit & Technologies" le 13 septembre 2007.
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