jeudi 20 mars 2008

Boycotter intelligemment les JO de Pékin

Que nous soyons idéalistes ou naïfs, peu importe, nous vivons dans des démocraties et nous sommes tous révoltés en apprenant que des moines tibétains ont été emprisonnés (et certains torturés) par les militaires et la police chinoises pour avoir osé exprimer leur opinion devant les caméras : "nous voulons la liberté, pas les jeux... les Chinois mentent", ont crié les Tibétains devant les caméras des reporters étrangers.
Document Reporters Sans Frontières.La Chine trouve scandaleux que "Reporters Sans Frontières" ait récemment comparé les anneaux olympiques à des menottes. En revanche, la Chine trouve normal de "rééduquer" et condamner aux camps de travail des moines tibétains qui ne demandent qu'à s'exprimer librement !
La Chine trouve également normal de ne pas respecter sa parole donnée au CIO, à savoir d'améliorer les Droits de l'Homme en Chine.
Pendant que le Gouvernement de Beijing (Pékin) continue à bafouer les libertés fondamentales au Tibet et alors que le Dalaï Lama a officiellement demandé l'aide internationale, aucun Etat ne semble entendre sa voix pour soutenir son peuple, comme ce fut également le cas en 1950 !
Jacques Rogge, président du Comité International Olympique (CIO) avait portant dit haut et fort que chaque fois que les Droits de l'Homme seraient bafoués, il ferait entendre sa voix. Or, à la veille des JO de Pékin 2008 qui se tiendront du 8 au 24 août prochain, le CIO est étonnement absent de la scène internationale et refuse à ce jour de se prononcer sur l'attitude révoltante de la Chine au Tibet et de la position du CIO.
Malgré les manifestations qui se sont produites jusqu'à Bruxelles, devant l'ambassade chinoise, ainsi qu'à Paris, ni la Belgique ni la France ni l'Europe ou même les Etats-Unis ne se sont prononcés officiellement sur ces émeutes de Lhassa et n'ont encore pris de décision quant au boycott ou non des prochains JO. Pourtant, ce n'est pas faute de connaître la situation en Chine et au Tibet; le "contentieux" tibétain remonte à... 1959 sinon plus tôt !
Boycotter ou pas les Jeux ?
Le Dalaï Lama n'a jamais demandé l'indépendance du Tibet ni même appelé au boycott des Jeux Olympiques. Il demande simplement de pouvoir dialoguer avec Pékin et que les Droits de l'Homme soient respectés dans la "région autonome" du Tibet. Seuls les indépendantistes tibétains revendiquent leur indépendance à défaut de pouvoir dialoguer avec Pékin.
Dans les faits, peu d'hommes politiques ou de sportifs souhaitent boycotter les JO qui demeurent avant tout une compétition sportive de haut niveau et doivent le rester.
En revanche, il ne fait aucun doute que la plupart des pays utilisent l'événement des JO pour promouvoir le tourisme, la technologie, les échanges commerciaux avec leur pays, et indirectement leur style de vie, leur politique et même l'opinion de certaines minorités (Cf. les JO de Mexico et de Munich).
C'est dans ce cadre que chaque participant peut agir malgré les contrôles policiers, le règlement olympique acceptant une certaine marge de tolérance quant à l'expression de la foie religieuse (certains portent une croix ou prient avec une compétition) ou des opinions personnelles, qui n'ont rien de politique.
Quelques initiatives politiques
Du côté politique il a quelques initiatives, au demeurant un peu trop timides. Ainsi, le Président français Sarkozy défend l'idée d'un boycott de la cérémonie d'ouverture tandis qu'Yves Leterme, Premier ministre belge, souhaite un accord européen. Ce n'est pas pour autant qu'à défaut d'accord à 27, aucun pays ne boycottera la cérémonie d'ouverture. Pour sa part, le président du Parlement européen estime que des mesures de boycott sont justifiées.
Sur le plan économique, personne n'envisage de boycott des produits chinois. De toute façon il faut être réaliste : si le blocus ou l'embargo n'est pas total, il sera inefficace et la population en sera doublement pénalisée. Enfin, la plupart des pays ont établi des liens commerciaux avec la Chine et il est inimagineable de demande à chaque acteur d'annuler sa commande.
Commznt agir concrètement ? Jusqu'à présent, il y a eu au moins deux initiatives concrètes : le Président américain G.Bush Jr a fermement demandé à son homologue chinois de dialoguer avec les Tibétains.
Suite aux émeutes, Willem Draps, le bourgmestre de la commune belge de Woluwé-St-Pierre a suspendu le jumelage de sa commune avec le district de Chaoyang (Pékin) en raison des "violences qui ont endeuillé le Tibet" depuis le 10 mars 2008. Parlant de "génocide culturel", le Conseil communal bruxellois évoque également les "violations flagrantes" des Droits de l'Homme et "l'isolation" du Tibet par les autorités chinoises.
Devant ces réactions, la Chine a qualifié les propos des journalistes occidentaux de mensongés et prétendu que les reporters étaient à la solde de la clique du Dalaï Lama...
En revanche, la plupart des responsables politiques, y compris les ministres des Sports des pays européens et la majorité des athlètes, sont déterminés à maintenir leur participation aux JO. Les sportifs sélectionnés sont toutefois libres d'y participer ou de se désister.
Enfin mi-avril 2008, le public français et américains ont clairement signifé leur désaccord avec la Chine en s'en prenant directement à la flamme olympique. Il en sera sans doute de même en Australie.
Boycotter intelligemment les JO
Il faut bien comprendre que pour le Gouvernement de Beijing, la cérémonie d'ouverture des JO est un symbole fort, un outil politique au service de la propagande. Pour la première fois, la Chine s'ouvrira officiellement au monde et compte bien user de cette opportunité pour promouvoir sa politique. Manifestant tibétain à Bruxelles le 19 mars 2008.
Beijing ne dira pas à ses compatriotes et aux téléspectateurs du monde entier "la Chine a invité 200 pays à participer aux Jeux". Elle dira plutôt "Les nombreux pays présents reconnaissent les bienfaits de la politique chinoise et le prouvent aujourd'hui en supportant l'action de la Chine...", etc. Ce discours n'a rien à voir avec l'esprit des JO. C'est pourtant à ce type de propagande que nous allons assister. Personnellement, je refuse de participer ou de me faire l'écho de ce jeu de dupes. Quelle position faut-il adopter ?
Il faut jouer le jeu des Chinois ! Ils aiment les symboles et la télévision ? Utilisons-les ! Mais à condition que les télévisions soient assurées de pouvoir rediffuser toutes les manifestations en direct, et pas avec une minute de différer, le temps que les autorités se décident ou non sur la diffusion d'une image ! Dans ce cas, nous sommes tous d'avis qu'il est préférable de ne pas retransmettre les JO !
Grâce aux JO, pour la première fois de leur vie les Chinois auront l'occasion de voir ce que le reste du monde pense d'eux. Nous devons profiter de cette occasion pour faire avancer la démocratie.
Porter un drapeau ou un écusson
En effet, il existe un moyen pour que les athlètes comme le public fassent entendre leur voix ou leur opinion. Il est par exemple possible de porter un petit drapeau tibétain sous sa veste et de passer devant les caméras officielles en brandissant ce drapeau.
Plus discrètement, en accord avec le CIO où les gouvernements des pays participants, les athlètes comme le public pourraient également porter un écusson sur leur maillot.
Ainsi, lorsque les gagnants d'une course monteront sur le podium et seront faces à plusieurs milliards de téléspectateurs, il sera difficile aux officiels de couper l'image à ce moment là... C'est donc le meilleur moment pour montrer son désaccord avec la politique chinoise et soutenir les Tibétains.
Est-ce un acte politique ? Un drapeau est un signe politique mais la liberté d'expression est un droit fondamental individuel dans tout état démocratique.
Si la Chine veut jouer dans la cour des Grands et traiter d'égal à égal avec l'Occident, elle doit aussi en accepter les règles démocratiques !
En affichant leur désaccord avec la politique chinoise, les spectateurs comme les athlètes exprimeront simplement leur opinion personnelle, leur "coup de gueule" face à la répression chinoise au Tibet.
Vous serez vite pris, me dites-vous, emprisonnés et condamnés pour manifestation et violation des lois chinoises. En tant que ressortissant étranger vous serez exclu de la Chine. Et après ? Votre action fera bien plus de dégâts dans les consciences que n'importe quel boycott. Un dicton chinois ne dit-il pas qu'une image vaut mille mots...
En voyant ainsi des milliers de personnes soutenir les Tibétains, les Chinois lobotomisés depuis des générations par la propagande du Parti communiste verront à quel point leur gouvernement les trompe et combien le monde désapprouve son attitude au Tibet !
Le peuple chinois et notamment les intellectuels se rendront alors compte que finalement le monde pense comme eux et que Tiananmen (1989) n'était finalement pas une simple manifestation d'étudiants. Devant l'évidence, le Gouvernement chinois pourra difficilement mentir à son peuple et sera bien contraint d'ouvrir le dialogue avec les Tibétains.
Situation géopolitique du Tibet
Pour la Chine, le Tibet est plus qu'un désert froid, un lieu de culte ou symbolique. Le sous-sol du Tibet est riche en minerais divers et le pays est situé à un endroit privilégié pour entrer en Inde. Avec ses nombreux glaciers, le "Toit du Monde" est également riche en eau alors que plusieurs provinces chinoises se désertifient. Enfin, le haut-plateau du Tibet domine toute l'Asie centrale et est d'autant plus accessible depuis Pékin qu'une voie ferrée rapide y a récemment été construite.
Depuis près de 50 ans le Tibet abrite également des garnisons chinoises et est devenu un zone franche très avantageuse pour plus de 4 millions de travailleurs chinois qui le considère comme un paradis fiscal et le pays de toutes les opportunités. De fait, la culture tibétaine est en voie de disparition, assimilée par la culture chinoise.
Pour toutes ces raisons, on peut imaginer que la Chine va garder son emprise sur le Tibet et va continuer à surveiller de près les moines, les seules autorités du pays qui osent exprimer leur opinion (comme ce fut le cas en Birmanie).
Pourtant, et contrairement à ce que pensaient certains chefs d'Etats comme le Général de Gaulle, ce territoire n'appartient pas à la Chine et fut conquis par la violence et dans le sang, ainsi que l'explique cet article, un sujet qu'ignorent superbement les livres d'histoire chinois !
Supporter le Tibet
Le Dalaï Lama recevant la Médaille d'Or d'Honneur du Congrès américain le 17 octobre 2007 à Washington DC. Image Sonam Zoksang/ICT.Devant les événements révoltant qui se sont déroulés au Tibet nous devons continuer à lutter pour libérer les Tibétains de la tyrannie chinoise.
Il faut que nos gouvernements démocratiques demandent à Pékin un assouplissement de la politique et un changement de régime au Tibet. Au pire, les démocraties devraient boycotter les produits chinois, mais nous savons bien que l'argent n'a pas d'odeur et que ni l'Europe ni les Etats-Unis n'accepteront cette mesure qui sera de toute façon inefficace, et c'est bien dommage.
Contrairement à ce qui dit Pékin, les Tibétains ont toujours été un peuple pacifique et tolérant. Les derniers événements nous démontrent que malgré la répression dont ils font tous les jours l'objet, ils ont encore le courage de défendre leur opinion sur la place publique. Car au Tibet, cher lecteur, le fait de prendre la parole devant les caméras peut vous condamner aux travaux forcés durant 30 ans ! Aussi, à l'abri de nos démocraties, nous pouvons bien aider les Tibétains à se défendre de l'oppresseur !
Pour supporter les Tibétains dans leur lutte contre la Chine, souscrivez aux ONG qui défendent le Tibet, notamment à Amnesty International qui relaye les actions de Free Tibet et aidez à la mesure de vos moyens les différents bloggers tibétains que vous trouverez sur la toile.
Pour plus d'information sur les actions en faveur du Tibet, consultez International Campaign for Tibet, les blogs et sites Internet Beijing Wide Open, Reporters Sans Frontières, Tibétains en France ainsi que les autres billets de ce blog dans les rubriques Chine, Peuple et Politique.

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