mardi 7 août 2007

La nouvelle génération de bras bionique

Un pas de plus vient d'être franchi dans la médecine bionique. En moins d'une génération, la robotique a fait d'énormes progrès dans ce domaine et propose depuis quelques années des prothèses révolutionnaires aux victimes d'accident ou aux vétérans de la guerre.
L'armée américaine révèle par le biais de son contractant, le Laboratoire de Physique Appliquée (APL) de l'Université Johns Hopkins, qu'elle vient de fabriquer le deuxième prototype de bras bionique. Le prototype a été présenté au cours de la conférence DARPATech 2007, le symposium sur la technologie et les systèmes développés par le DARPA, qui se tient à Anaheim, en Californie, du 7 au 9 août 2007.
Ce bras bionique est destiné à remplacer l'avant-bras droit de l'ingénieur Jonathan Kuniholm, qu'il perdit en 2005 alors qu'il servait dans le corps des Marines en Irak.
Ainsi qu'on le voit sur l'image présentée ci-dessus, sa main est en acier inoxydable et comprend 5 doigts dont un pouce opposable. Jonathan, que l'on voit ci-dessous, peut bouger ses doigts en envoyant des signaux nerveux aux muscles de son avant-bras grâce à des électrodes fixés dans sa poitrine qui relayent ensuite les commandes à l'appareillage électronique et vice-versa.
Toutefois le système n'est pas encore parfait car les électrodes sont encore un peu volumineux, les mouvements ne sont pas encore assez fluides et le bras dépend d'une alimentation externe.
Un projet international
Ce bras bionique est le résultat d'un ambitieux projet international. L'ingénieur Jonathan Kuniholm en train de paramétrer son avant-bras droit bionique. Document Michael Belfiore.Pour créer ce prototype unique en son genre, le DARPA (où fut inventé ARPANET en son temps, l'ancêtre d'Internet) a fait appel au savoir-faire des ingénieurs de 28 instituts de recherches de six pays.
Ils ont cherché la meilleure manière d'intégrer le logiciel d'interprétation des signaux, les processeurs fabriqués sur mesure, les moteurs électriques et autres systèmes d'actuateurs dans un bras aussi compact que possible, afin que son propriétaire puisse accomplir normalement les tâches de la vie quotidienne, comme lier ses lacets, utiliser un clavier d'ordinateur, jeter une balle et même jouer du piano, uniquement en transmettant ses ordres à son bras, par la pensée.
Les limites des systèmes myoélectriques
Ce projet révolutionnaire qui vise à fabriquer la meilleure prothèse possible avec la technologie actuelle, est chapeauté par Deka Research & Development, une companie établie à Manchester, dans le New Hampshire, dirigée par Dean Kamen, l'inventeur du Segway et de nombreuses autres inventions comme en témoignent ses 83 brevets déposés à ce jour.
Deka souhaitait révéler son invention plus tard cette année, mais l'APL a insisté pour le révéler dès à présent pour inciter la recherche à avancer.
Jusqu'à présent, le système bionique développé par Deka et l'APL exploitait des systèmes de contrôles myoélectriques inventés par Todd Kuiken de l'Institut de Réhabilitation de Chicago (RIC).
Jesse Sullivan portant la première génération de prothèse bionique fabriquée notamment par l'APL.Les systèmes de commandes myoélectriques conventionnels utilisent des électrodes fixés sur la surface de la peau pour lire les signaux musculaires sur la partie du corps non amputée, dans le dos par exemple, et transportent le signal jusqu'au membre artificiel. L'amputé doit accomplir un mouvement de l'épaule ou des omoplates pour que son bras se déplace en réponse au signal.
Cette procédure n'étant pas intuitive, en 2002, Kuiken améliora son système et redirigea chirurgicalement les nerfs du moignon du bras de l'amputé Jesse Sullivan, aux muscles de sa poitrine. Ces derniers ainsi réinervés permettent à Jesse de déplacer plus naturellement son bras artificiel, les électrodes placés en surface capturant son activité musculaire pour contrôler l'intensité du signal. Kuiken a également réussi à rediriger avec succès les nerfs sensitifs pour donner au membre artificiel un certain degré de sensation tactile.
Mais les électrodes de surface manquent de résolution pour permettre à un bras artificiel de se plier ou tourner le poignet. Pour y parvenir, jusqu'ici l'utilisateur devrait accomplir des mouvements grossiers pour activer des actions préprogrammées.
La révolution des IMES
Le nouveau défi est donc ambitieux. Les ingénieurs ont utilisé des capteurs myoélectriques de la taille d'un grain de riz, des IMES (Injectable MyoElectric Sensors), développés par Robert Weir du RIC afin de rendre le bras plus compact.
Reste également à résoudre le problème de l'alimentation du bras qui est actuellement tributaire d'un système de câblage et d'une alimentation externes. La version finale du bras disposera d'une alimentation intégrée, sans augmenter pour autant le poids de la prothèse. Pour y parvenir, les ingénieurs de l'Université Vanderbilt travaillent sur des systèmes d'actuateurs pneumatiques alimentés par du gaz produit par une réaction du peroxyde d'hydrogène avec un catalyste à base d'iridium.
Ce genre de prothèse reste néanmoins très cher. Le prototype de Jesse a coûté 100000$, sans compter les frais de chirurgie et la maintenance régulière.
Ce projet devrait aboutir en 2009 à un troisième prototype de bras bionique qui devrait recevoir directement les signaux électriques des terminaisons nerveuses ou du cerveau de la personne amputée. Selon le DARPA, ce "bras mécanique sera capable d'imiter les propriétés et les perceptions tactiles d'un organe biologique". Ce jour là, Jesse et Jonathan pourront réellement ressentir ce qu'ils touchent.

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