mardi 20 novembre 2007

Des cellules de peau changées en cellules souches

Deux groupes de scientifiques ont réussi à transformer des cellules de peau humaine directement en cellules qui ressemblent et se comportent comme des cellules souches, ouvrant ainsi un accès potentiellement illimité au remplacement de tissus ou d'organes endommagés, selon deux études publiées le 20 novembre 2007 dans le magazine Science et rapportées par l'agence AFP.Cellule souche. Document AFP.
Cette découverte réalisée simultanément par une équipe japonaise et une équipe américaine "va complètement changer le champ" des recherches, estime James Thomson, auteur de l'étude américaine.
Les cellules souches sont considérées comme une possible thérapie face à certaines maladies mortelles ou handicapantes, car elles peuvent évoluer en l'un des 220 types de cellules différents que comprend le corps humain.
Mais l'accès aux cellules souches pluripotentes (ou cellules embryonnaires), même à des fins de recherche, est limité en raison de considérations éthiques sur l'utilisation et le clonage d'embryons humains. De plus, les organes transplantés obtenus à partir de cellules souches pluripotentes peuvent être rejetés par le patient ou provoquer des cancers.
Cette nouvelle technique, une fois améliorée, pourrait permettre de créer des cellules souches ayant le code génétique du patient, éliminant ainsi les risques de rejet et de développemement de tumeurs.
Une opportunité pour la recherche
En permettant aux scientifiques d'avoir plus facilement accès aux cellules souches, elle devrait aussi permettre de faire avancer rapidement la recherche pour le traitement du cancer, des maladies d'Alzheimer et de Parkinson, du diabète, de l'arthrite, des lésions de la moelle épinière, des attaques, des brûlures et des maladies cardiaques et pulmonaires.
Ce travail "est monumental par son importance dans le champ de la recherche sur les cellules souches embryonnaires et par son impact potentiel sur notre capacité à accélérer les applications de cette technologie", a déclaré Deepak Srivastava, directeur de l'Institut Gladstone sur les maladies cardiovasculaires (UCSF).
La technique
Les deux équipes ont réussi à transformer les cellules de peau en cellules souches en insérant quatre gènes différents dans les cellules au moyen d'un rétrovirus.
Le rétrovirus est un organisme tout aussi dangereux qu'un virus. En effet, c'est une sorte de virus qui se passe des ARN-messagers; il assure lui-même l'assemblage des protéines. Non seulement le rétrovirus leurre la cellule hôte au moment de la reproduction mais généralement il la détruit en provoquant de nombreuses maladies infectieuses à l’origine des cancers.

Document Doug Brutlag/U.Stanford francisé par l'auteur.

L'équipe japonaise, conduite par Shinya Yamanaka de l'Université de Kyoto a réussi à créer une lignée de cellules souches à partir de 5000 cellules. Son étude paraîtra le 30 novembre dans le magazine Cell.
"Cette efficacité peut paraître très faible, mais cela signifie qu'à partir d'un seul échantillon de peau de 10 centimètres, on peut obtenir de multiples lignées induites de cellules souches pluripotentes (iPS)", a-t-il expliqué.
Le problème d'innocuité
Comme la méthode développée antérieurement par l'équipe américaine de James Thomson et Junying Yu de l'Université du Wisconsin, les deux techniques présentent des risques de mutation, car les cellules conservent une copie du rétrovirus utilisé pour y insérer les gènes.
Selon l'auteur de l'article, la prochaine étape-clé sera de trouver un moyen d'activer les gènes qui permettent aux cellules de peau de régresser en cellules souches sans utiliser de rétrovirus.
En effet, du fait que les nouveaux gènes peuvent induire des mutations dangereuses pour le patient, les scientifiques doivent encore trouver une méthode afin que les nouveaux gènes disparaissent d'eux-mêmes durant la division cellulaire ou trouver une autre technique ne faisant pas appel aux rétrovirus.
Les deux équipes pensent toutefois que le plus dur a été fait. "Cela peut prendre des années, mais comparé à l'identification des gènes de déprogrammation, ceci n'est pas vraiment un problème", a déclaré Junying Yu.
Les dangers
Le risque associé à cette méthode n'est pas nul et les scientifiques ne peuvent pas s'arrêter à ce stade. Ainsi que nous l'avons évoqué, par nature les cellules souches pluripotentes sont capables de se diviser indéfiniment. Elles flirtent donc dangereusement avec le processus de développement des cellules mutantes qui peuvent devenir cancéreuses.

Des cellules différenciées. Document Cell Press.

Des tests effectués sur des souris ont montré qu'elles peuvent se transformer en tératome (tumeur bénigne ou maligne) ou en tératocarcinome (tumeur maligne de l'épithélium) et donc développer des cancers.
Par sécurité, on ne peut utiliser les cellules souches pluripotentes que lorsque celles-ci se sont différenciées en un type de cellule précis. Actuellement, quelle que soit la méthode employée pour séparer les cellules pluripotentes de leur progéniture différenciée et non cancérigène, il faut impérativement s'assurer que cette séparation est parfaite, sans aucun risque.
Ici nous avons procédé à l'envers, mais le problème reste entier dès lors que ces cellules vont se différencier.
Une étude qui ne fait que commencer
Robert Lanza, scientifique auprès de la société de clonage américaine Advanced Cell Technologies tempère donc cette découverte, expliquant qu'il est trop tôt pour savoir si la reprogrammation de ces cellules peut aboutir à un quelconque bénéfice thérapeutique.
"C'est la première étape de la recherche. Nous n'abandonnerons pas les autres études sur les cellules souches. Nous ne pouvons pas savoir avec certitude si elles vont se différencier de la même manière que les cellules souches pluripotente normales", a-t-il déclaré.
"Il est presque inconcevable, au rythme où évolue la science, que nous ne trouvions pas un moyen d'y arriver", a déclaré au magazine Science Douglas Melton, spécialiste de la recherche sur les cellules souches à l'Université d'Harvard.
"Si nous arrivons à surmonter les problèmes d'innocuité, nous pourrons utiliser les cellules iPS humaines dans les thérapies de transplantation cellulaire", espère M. Yamanaka, qui juge cependant "prématuré de conclure que les cellules iPS puissent remplacer les cellules souches pluripotentes" et qui rappelle que "nous sommes encore loin de la découverte de traitements ou de thérapies à partir des cellules souches".
Pour plus d'information, consultez les articles L’anatomie et les fonctions des cellules et Le génie génétique.

1 commentaire :

  1. je trouve cela fantastique c'est une très grande avancé dans le monde de la médecine mais aussi dans le monde des biotechnologies.

    RépondreSupprimer