mardi 19 juin 2007

14% des Belges vivent dans la précarité

Les résultats de l'année fiscale 2006 révèlent qu'un Belge sur sept (14%) soit près de 1.5 millions de personnes vivent en situation de précarité ou de pauvreté en terme de revenu.
Selon EUROSTAT, 16% des ménages belges présentaient un risque de pauvreté en 1999. Il était de 18% en France, 16% en Allemagne, 12 % au Luxembourg mais atteignait 21% au Royaume-Uni.
En Belgique, en 2007, le seuil de pauvreté était fixé à 822 € pour une personne isolée et à 1726 € pour un menage avec deux enfants.
A titre de comparaison, au Luxembourg, pays riche mais où le coût de la vie est également très élevé, le seuil de pauvreté (RMG) est fixé à 1197 € pour une personne isolée et 1995 € pour un ménage sans enfant. Signe du malaise social, depuis 1986, deux fois plus de ménages bénéficient de l'aide sociale du Fonds de Solidarité.
Mais ni en Belgique ni au Luxembourg, ce minimum vital ne signifie que cela soit suffisant pour vivre; c'est un seuil conventionnel indexé fixé par la loi.
La précarité, maladie de notre société
On peut dire sans même exagérer que le monde devient plus riche et plus pauvre, tellement la disparité entre riches et pauvres s'accentue au fil des années. On n'a jamais vendu autant de voitures de luxe, d'avions d'affaire, de yatchs de prestige et de propriétés somptueuses que ces dernières années alors qu'en parallèle, à l'ombre des buildings des multinationales, on constate une augmentation du nombre de pauvres gens. Comment expliquer ce paradoxe ?
Comment un salarié ou un ménage de la classe moyenne aux revenus parfois importants tombe-t-il dans la précarité ? La suppression d'un facteur de sécurité tel que le revenu et, s'il dure longtemps, peut faire tomber des personnes d'une situation de richesse relative à celle de la précarité puis de la grande précarité si la situation se dégrade.
Ces "nouveaux pauvres" comme on les appelle concernent en moyenne 12% des Européens en situation de précarité mais seulement 6% des Français, contre 16% des Canadiens mais à peine 1% des Chinois de Taïwan.
Nous sommes inégaux face à la pauvreté
Quelle que soit son âge, une personne seule, peu éduquée, sans contact avec l'extérieur, sans aide et sans occupation va plus rapidement sombrer dans la pauvreté, la dépression et les problèmes de santé qu'une personne cultivée, ayant des relations et des occupations.
Cela sous-entend que la pauvreté ne dépend pas seulement du facteur économique et de la volonté de la personne ou de l'aide qu'elle peut obtenir, mais également de facteurs culturels.
L'éducation (les diplomes et la maîtrise des langues) est le principal moteur qui conditionne la précarité potentielle d'un individu. Au plus son niveau d'étude est faible au plus élevé sera le risque qu'il soit licencié (chômage structurel) ou qu'il trouve un emploi précaire.
Ce n'est donc pas sans raison que tous les parents poussent leurs enfants à faire des études supérieures ou un métier d'avenir qui offre des débouchés.
Le sentiment d'humiliation
Un point important et plus pervers que comprennent mal les salariés peu concernés par cette problématique, est le fait que la pauvreté consiste à devoir demander des aides publiques financières, alimentaires ou juridiques en justifiant à chaque fois son manque de revenus, sa composition de ménage voire ses problèmes de santé. Cette aide est souvent perçue comme une intrusion dans la vie privé. La personne qui est déjà victime et pénalisée par sa situation précaire ressent alors un sentiment d'humiliation et d'impuissance. A long terme, cette situation dégradante peut conduire certaines personnes à commettre l'irréparable.
Les limites de l'aide sociale
Le système de sécurité sociale est performant en Belgique mais pour ceux qui y échappent, il reste le revenu d'intégration social géré par le centre public d'aide social (CPAS). Si une personne ou une famille ne s'en sort vraiment pas, elle pourra toujours solliciter l'aide du CPAS, mais ce dernier sera seul juge de la situation et de l'aide à lui accorder.
Les SDF (Les Enfants de Don Quichotte) ont manifesté le long du Canal Saint-Martin à Paris entre décembre 2006 et avril 2007. Photographie prise le 18 décembre 2006 par Charles Platiau de l'agence Reuters.Le CPAS aide ainsi les jeunes qui voient leurs indemnités de chômage diminuer, les divorcés au chômage qui doivent payer des pensions alimentaires, les travailleurs licenciés à l'étranger qui reviennent au pays sans y avoir cotisé durant les trois dernières années ou les pensionnés qui n'ont pas assez de revenus.
Pour une personne isolée, l'aide du CPAS se limite à 657 € et parfois uniquement à des bouteilles de lait un peu de nourriture si elle bénéficie déjà d'une allocation de chômage.
Bien entendu, personne ne peut payer son loyer, ses factures et vivre avec si peu d'argent, d'où le nombre croissant de sans-abris dans nos villes.
Si la personne estime ne pas avoir été entendue, elle peut faire appel aux services d'un avocat commis d'office et plaider sa cause en justice. On peut en sourire, mais c'est un droit accordé à tout individu.
Paradoxalement, tous les partis politiques sont d'avis qu'il faut augmenter cette allocation de survie quitte à modifier les modalités d'octroi ou le suivi des demandeurs, mais personne ne s'en occupe ! Qu'on ne s'étonne pas alors que de plus en plus de personnes vivent dans la rue, rejoignant le nombre sans cesse croissant des SDF. Ainsi que le disait l'abbé Pierre, "la misère est muette, le pouvoir est aveugle".
Le cercle vicieux de la précarité
Contrairement à ce que beaucoup de travailleurs pensent encore, la majorité des personnes dans une situation précaire veulent s'en sortir mais n'ont souvent pas assez de revenus pour survivre décemment.
Si tout travailleur licencié ayant fait quelques économies peut survivre quelques temps avec l'allocation de chômage, il y aura un moment où ses économies ne suffiront plus pour payer le loyer, la nourriture, les médicaments ou les factures. Ce jour là il sera obligé de déménager pour louer un appartement plus petit et moins cher et revendra éventuellement une partie de ses biens, en espérant en tirer un bon prix, ce qui est rarement le cas. Et ainsi commence l'engrenage et l'effet boule de neige de la pauvreté.
SDF installés à Lyon. Document M6.Sous le poids des dettes, certains plongent donc naturellement dans l'illégalité pour gagner quelques euros de plus et nourir leur famille, quand ils ne se font pas escroqués par des margoulins.
Plus le revenu diminue plus les personnes ont tendance à réduire leurs frais de nourriture et leurs soins. Or ces deux facteurs sont essentiels à leur survie. Sans protéines ni sucre, point d'énergie et sans un minimum de soins, le malade risque l'infection voire la paralysie. Pour preuve, aujourd'hui des personnes meurent encore régulièrement parce qu'elles n'ont pas pu se faire soigner les dents ou se payer les médicaments pour soigner une crise chronique !
Agir en personne responsable
Enfin, même en travaillant, certaines personnes n'arrivent pas à boucler leur fin de mois. Beaucoup d'exemples sont liés à la responsabilité du travailleur précaire, des indépendants (dont les artistes et les jeunes à la direction d'une nouvelle entreprise) et des ouvriers dans beaucoup de cas, qui manquent de maturité et ne se projètent pas suffisamment dans l'avenir. Ils vivent au jour le jour, à crédit parfois, sans se préoccuper du lendemain, de payer leur factures, de contracter une assurance complémentaire ou d'assurer leur vieux jours.
Les solutions
Si chacun de nous ne peut pas abriter un sans-abri pour diminuer les statistiques, les gouvernements ont essayé plusieurs solutions qui à ce jour n'ont jamais été franchement appliquées.
Il y a notamment les projets de construction de logements sociaux qui manquent cruellement dans toutes les villes du fait de leur manque chronique d'argent et d'une gestion que l'on sait d'avance à charge de l'Etat. Ensuite, l'application du droit au logement inscrit dans la loi devrait être appliqué en force. Il permettrait d'attribuer aux plus démunis un appartement décent dans l'un des dizaines de milliers d'immeubles qui restent inoccupés depuis des années. Enfin, le gouvernement peut réduire la fiscalité sur les investissements immobiliers.
Les textes de loi.Alors qu'est-ce qu'on attend ? Le prochain hiver ou la prochaine grande tempête afin que tous les sans-abri crèvent de froid pour enfin pouvoir modifier les statistiques ? Certes, il y a toujours le problème financier à résoudre et chacun sait que les promoteurs n'aiment pas investir dans des habitations sociales qui ne rapportent pas. Mais on peut estimer qu'un gouvernement qui veut montrer l'exemple et aller de l'avant peut édicter des lois pour venir à bout de n'importe quel problème. A défaut d'idées, on peut les inviter à visiter nos pays voisins. Le public est partant tant que cela peut créer des emplois et offrir un meilleur niveau de vie au plus grand nombre. L'abbé Pierre avait bien raison, la majorité de nos politiciens n'ont cure d'un électorat qui ne votera de toute façon jamais pour eux. Triste mentalité.

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