lundi 8 décembre 2014

Quand le chromosome Y part en fumée

Dans une étude publiée dans la revue Science le 4 décembre 2014 et menée sur 6000 hommes par des chercheurs suédois, britanniques et américains, le généticien Jan Dumanski de l'Université d’Uppsala et son équipe sont arrivés à la conclusion que les hommes qui fument ont trois fois plus de risque de voir leur chromosome Y disparaître de leurs cellules sanguines.
Un chromosome qui part en fumée
Les chercheurs ont analysé les cellules sanguines de sujets masculins à la recherche du chromosome Y, un fragment d’ADN uniquement présent chez les hommes (les femmes ayant deux chromosomes X).
Cette étude confirme que les grands fumeurs ont trois fois plus de cellules sanguines sans chromosome Y que les non fumeurs tandis qu'on observe un rétrécissement du chromosome Y chez les autres fumeurs.
Cette disparition en fumée serait également accompagnée d'un risque accru de cancer mais on ignore s'il y a un lien direct avec le développement des cancers.

Le caryogramme du génome humain comprend 46 chromosomes répartis en 23 paires porteuses des gènes du patrimoine héréditaire. Il y a 22 paires d'autosomes et 1 paire de gonosomes porteurs des "gènes sexuels", XY chez l'homme et XX chez la femme (mais les deux X ne sont pas identiques). Chez les hommes fumeurs, le chromosome Y a tendance à se rétrécir ou à disparaître et serait associé à un risque accru de cancers. Ce caryogramme fut réalisé par la technique de FISH (Fluorescent In-Situ Hybridization) qui permet de mettre en évidence les éventuels mélanges chromosomiques.
Le rôle du chromosome Y
Nous savons depuis des décennies que la fumée de tabac est un facteur de risque pour de nombreuses maladies et cette découverte est encore plus inquiétante car elle affecte le patrimoine génétique.
Parmi les 23 paires de chromosomes que nous possédons, le chromosome Y représente moins de 2% des chromosomes des cellules et comprend quelque 50 millions de nucléobases (A, C, G,T).
Ce chromosome comprend notamment le gène SRY lié à la détermination du sexe, la régulation de la production de sperme et d'autres liés au développement de certains cancers.
Bien que nous ayons cartographié l'entièreté du génome humain en 2001, un travail qui dura plus de 20 ans, les chercheurs ne comprennent pas encore le rôle de toute cette machinerie, et en particulier l'expression des gènes du chromosome Y qui reste encore mal comprise.
Nous savons que les chromosomes de l'ADN peuvent subir des mutations au cours de leur vie, comme des méthylations, des compactions, une inactivation chromosomique, une épigénétique structurale (pathologie héréditaire liée aux prions) et même des interférences avec l'ARN.
Les mutations génétiques sont communes et plus fréquentes chez les hommes, y compris les cancers. Cette étude renforce ce constat en reliant le sexe et certains cancers dont l'issue est fatale.

La paire de chromosomes X et Y. Document Biophoto Associates.
En effet, la disparition du chromosome Y est associée à un risque plus élevé de développer des cancers non hématologiques, c'est-à-dire tous les cancers à l'exception des leucémies (cancers du sang) et des lymphomes (cancers des cellules du système immunitaire).
La bonne nouvelle est que cette anomalie peut disparaître et le chromosome Y peut reprendre sa forme initiale ou même réapparaître si le sujet arrête de fumer !
Si les fumeurs invétérés veulent avoir des enfants et en particulier des garçons, ils savent à présent que le tabagisme est un facteur de risque qu'ils peuvent éviter.

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